Retour sur les 30 années d’endimanchés
à la Parole Errante et à la Quincaillerie

La compagnie les endimanchés a eu trente ans en 2023 et ceci a été l’occasion d’une grande fête durant plusieurs jours à la Parole errante à Montreuil puis à la Quincaillerie -les-Laumes.

Une histoire qui débute en Juin 1993 avec la création de Cabaret Voltaire à Nevers et se poursuit aujourd’hui avec Contre-Attaque.

Représentations de Chemin de fer et autres réjouissances à la Parole Errante ( Montreuil )

 

endimanché,ée ; part. passé et adj.
Au fig. [En parlant de l’attitude intérieure ou extérieure d’une pers.]
Qui est gauche, maladroit, comme pris dans des habits trop apprêtés, parce que trop peu portés.
 « …encombrée d’une joie inutile, ils errèrent sans but. La semaine entière, ils s’étaient préparés à une gaieté extraordinaire. Maintenant ne sachant à quoi l’employer, leurs cœurs s’en trouvaient comme endimanchés et à la gêne. » Guèvremont, Le Survenant.

 

Un anniversaire à la parole errante, où la compagnie a joué Changer la vie en 2015 et Modules dada en 2018 au terme d’une dizaine de jours passés en immersion totale. Sans doute l’une des expériences les plus marquantes pour la compagnie en termes d’articulation entre une proposition, le lieu d’accueil et ce qui s’est inventé, collectivement, in situ.

Un anniversaire pour fêter quoi ? toutes les complicités et ramifications qui ont inspiré ou guidé les choix, les mouvements, les bifurcations de la compagnie ? pour fêter toutes les amitiés anciennes et en devenir qui gravitent  ou ont gravité, de près ou de loin dans ce sillage et ces transversalités ? Pour ouvrir les archives et les traces confuses à ressaisir de toutes ces années à bricoler dans tous les sens et parfois sur tous les fronts ; celui de l’exploration des textes,  de la création musicale, de la fabrication de disques et la réalisation de  films liés aux projets, de la construction métallique  et du collage des bris, de la fréquentation de la Clinique de la Borde et de l’inspiration de la Psychothérapie institutionnelle, de la collaboration au long cours avec André Robillard et la constitution de la Collection Tuer La Misère, de l’articulation  enfin prolifique et débordante avec l’invention d’un lieu – La Quincaillerie.

Un anniversaire pour fêter tout ça à la fois, se ressaisir de quelques bribes et ramasser les copeaux, regarder des films jusqu’au bout de la nuit, inventer ce que l’on ne connaît pas encore avec celles et ceux qui le voudront bien, exhumer quelques textes et images, déballer des spoutniks et des fusils,  inviter les présences proches et amitiés lointaines, les lieux complices et les alliés, les connivences et les trouvailles.

Remerciements

Un immense merci à vous toutes et tous qui étiez là et nous avez soutenu durant ces trois jours à la Parole errante ; que ce soit par votre présence, les signes à distance et tout ce qui s’est manifesté de manière sous-jacente… ou encore par les gestes les plus concrets pour construire ce paysage accueillant et peuplé et mettre en mouvement  des espaces habituellement séparés. (De la compagnie à la Parole errante en passant par les collectifs invités, les lieux de soin, studio-son, radios, etc.)

Merci au collectif la Parole errante demain, de nous avoir accueilli, porté et soutenu la semaine durant, inventant avec nous les impromptus, les renforts et soutiens matériels, au jour le jour, pour que tout cet entremêlement prenne vie.

Ce que nous avons traversé est bien « ce qui nous constitue » comme l’a dit B. à propos des images de l’Opéra de  quat’sous à la Borde. Mais quel est ce nous mystérieux, multiple et hétérogène fait d’amitiés proches et lointaines,  anciennes et nouvelles, à l’intérieur et hors de la Compagnie - Paysage éclaté et pourtant recomposé par strates le temps d’un week-end, avec au centre de ces embranchements la dimension de la rencontre / Grand déploiement de la collection Tuer la misère-André Robillard / Traces chaotiques de Changer la vie à la Quincaillerie / Chemin de Fer  remis sur le métier pour l’occasion / Images hors-temps et hors champ de l'Opéra de quat'sous à la Borde réactivées  par la radio Bruits de couloirs / Chemin de Fer encore, comme sorti de ses rails / et - articulées grâce aux ami.e.s de la Parole errante - intervention depuis le Val Susa à propos du train à grande vitesse Lyon-Turin - retour sur l’histoire d’un  mouvement en quelques échanges / puis le lendemain intervention à propos de la mise en circulation du premier tronçon  du train Maya par une personne rencontrée à la Quincaillerie au moment du voyage pour la vie Zapatiste. Échos lointains certes, mais persistances de solidarités toujours vives - depuis la Parole errante - avec des territoires en lutte.

Le dimanche se sont ouverts les « chemins cherchés, chemins perdus, transgressions » ; Tentatives d’évoquer « ce qui  nous constitue » et de le mettre en partage en révélant par bribes de récits, les arrières-plans, les rencontres, les enjeux esthétiques et politiques, les lisières, les absences et les soudaines bifurcations, les constellations et les devenirs de cette compagnie sous la forme d’une polyphonie de voix et de présences, avec comme soubassement trente années d’archives  sonores exhumées et recombinées par le studio-son de la parole errante et les saillies de moments musicaux rejoués,  effilochés, rafistolés. Un grand moment de tâtonnement d’écoute attentive, de reformulation non linéaire, et de pensées  sauvages. « j’avais comparé ça à des oiseaux.. On a des tas d’oiseaux comme ça qui piaillent … Et puis de temps en temps, il faut bien dire quelque chose, alors on en prend au piège (…) Mais n’empêche que ça continue de piailler. Si on n’est pas  attentif on n’entend pas piailler. Mais si on est trop attentif on est polyhalluciné tout le temps…» J.Oury

Puis tout ce sérieux et précaire parfois teinté d’humour, toutes ces pistes ouvertes par ce moment radiophonique, tout  ceci balayé d’un revers de main par l’auto-dérision des vieilles branches, venues démystifier et falsifier l’histoire de la compagnie ; revers de bâtons des complicités retrouvées sous la forme d’une performance loufoque ponctuée par les lumineuses  vibrations d’images en super 8 d’anciennes pièces.

Ainsi nous avons tenté le temps d’une après midi de traverser toutes les strates de cette histoire décousue, d’en révéler à  plusieurs voix les ambiguïtés, les contradictions, les intentions dérisoires et leur pendant de gravité ou de désinvolture…  retour au terme d’une après-midi vers les méandres, les affres et la joie partagée de « ce qui nous constitue » et les questions  avec lesquelles nous continuons de cheminer : Comment est-ce que tout cela s’articule ou se connecte avec d’autres préoccupations  ou d’autres urgences ; quelles orientations nouvelles indiquent ces lignes de partage, quels point de continuité, quelles connivences pouvons-nous imaginer entre les lieux et « comment faire pour continuer sans que ça s’arrête…? »

Et bien justement nous vous avons proposé de nous retrouver pour celles et ceux qui le pouvaient pour une journée à la Quincaillerie,  le 27 Janvier, en écho à ce moment… Au programme : des Projections de films (Divine Party, l’opéra de Quat’sous à la Borde )  une écoute des émissions réalisées à la Parole errante, petite exposition et documents…  et le soir un nouveau et bref récit rétrospectif de l’histoire de la compagnie en quelques chansons et images…  + Concert surprise de Das Ding, un groupe issu de cette longue histoire dont ce a été  le premier concert…!!

Programme du dimanche 10 décembre en images

L'Opéra de Quat’sous à la Borde

Emission Bruits de couloir – Fréquence Paris-Pluriel. Discussion à propos des ateliers qui sont pratiqués dans les lieux d’accueil et de soin. Bruits de couloir / La trame de Saint-Denis/ Collectif encore heureux / Collectif les désaxées-Montreuil)

Programme des festivités :

6 décembre 

20h00 : présentation du livre Chaînes sans fin d’Yves Pagès – Éditions zones à l’invitation de la Librairie Michèle Firk

8 décembre 

Dès 16 heures / Ouverture de l’espace de projection de films des spectacles anciens de la compagnie
– De cabaret Voltaire à Modules Dada. 30 années de remue-ménage théâtral.

17h00 :  ouverture de l’exposition de la collection Tuer la misère – André Robillard
18h30 : projection du film « Changer La vie » à la Quincaillerie (2014) – Changer la vie, spectacle créé en 2011 au LaM de Villeneuve d’Ascq, avec André Robillard à l’occasion de ses 80 ans…

20h30 : Spectacle Chemin de fer, l’un des derniers spectacles de la compagnie, créé en 2019 à Dijon.
Dans une forme qui oscille entre le spectacle/machinique, le concert et le théâtre-document, Chemin de Fer tente de retracer une histoire hybride de l’impact du train, ce moyen de transport, sur nos vies, nos environnements et nos imaginaires.

9 décembre

16h00 : Projection du film l’Opéra de quat sous à la Borde en 2005,  spectacle créé le 15 août  2005 à l’invitation des Planches labordiennes avec les patients, soignants, et stagiaires de la clinique.

17h00 : Moment d’échange autour des pratiques de soin et des pratiques d’atelier, les expériences et rencontres aux marges ; animé par Bruits de couloir, la radio de La Trame à Saint-Denis.

20h30 : Spectacle Chemin de fer !

10 décembre

de 14h00 à 21h00
Journée ouverte de festivités endimanchées d’hier et d’aujourd’hui…

Trois espaces-temps s’articulent, se superposent ou se télescopent tout au long de la journée…

– Un long temps radiophonique pour dérouler à la fois un récit musical anecdotique et chaosmique de l’histoire de la compagnie et accueillir des formes d’intervention, prises de parole de collectifs et/ou personnes présentes.

– Un petit programme archéologique, avec les films super 8 de la complice Cécile Saint-Paul, la présence vive des anciens, quelques chansons, lumières, impromptus et petites mémoires… des bouts de trucs et des  machins de théâtre dans l’espace éclaté et les recoins de la Parole errante.

– Un recueil des traces, réminiscences et collectes de papiers froissés… amenez ou venez fabriquer vos  souvenirs, collages, critiques, dessins, photos, affiches, textes, récits, anecdotes en lien proche ou lointain  avec des souvenirs endimanchés. Ultérieurement se construira un recueil de Traces/endimanchées.

 Et la Machine à Gazouiller… un endroit où écouter les extraits de ce processus au long cours de création sonore en lien avec Le Chaosmosemedia des trente ans de la mort de Felix Guattari…!